Taxe foncière : devient-elle un impôt sur la fortune immobilière déguisé ?

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16/7/2025

La taxe foncière progresse depuis des années, parfois très vite. Pour de nombreux propriétaires, elle ressemble désormais à un véritable impôt sur leur patrimoine immobilier, bien au-delà de sa vocation initiale. Nous décryptons cette évolution et les manières d’en limiter l’impact.

demander la révision de base, faire de la rénovation énergétique, stratégie de démembrement ou création d'une SCI
Réagir face à l'augmentation de la taxe foncière

📈 Évolution et contexte actuel

La hausse constante de la taxe foncière est alimentée par l’indexation sur l’inflation. La base imposable a augmenté de +17 % entre 2021 et 2025, et de +23,2 % depuis 2016, uniquement grâce à la revalorisation annuelle (Source : ToutSurMesFinances).
À cela s’ajoutent les hausses votées localement. En 2025, l’augmentation mécanique minimum est de +1,7 % due à l’inflation.
Résultat : un milliard d’euros supplémentaire pour les villes. En 2024, la taxe foncière sur les propriétés bâties a rapporté 55,3 Md€, payés par 33 millions de propriétaires (Source : DGFiP), confirmant son poids structurel.

🏘️ Une charge qui pèse davantage sur les ménages modestes

Pour beaucoup de propriétaires modestes, la taxe pèse lourd. Elle représente jusqu’à 4 % du revenu disponible pour les foyers à faibles revenus, alors qu’elle n’atteint que 1,6 % pour les plus aisés.
Ce caractère régressif est renforcé par le fait que la taxe foncière s’applique à tous, sans seuil d’exonération patrimoniale, contrairement à l’IFI.

⚖️ La taxe foncière, un "IFI déguisé" ?

L’IFI concerne les patrimoines immobiliers nets > 1,3 M€. Aujourd’hui, 164 000 foyers y sont assujettis. En comparaison, la taxe foncière touche tous les propriétaires et hausse pour la majorité d’entre eux.
Dans certaines zones, la somme de ces deux impôts s’accumule : à Paris, où la taxe a bondi de +83 % depuis 2013, et à Strasbourg où elle monte de +52 % sur dix ans (Source : Actu-Juridique).
Cette combinaison élargit la pression fiscale sur un cercle plus large que celui traditionnellement associé à l’IFI.

🌍 Focus villes : exemples concrets 2025

Voici des exemples concrets de taux municipaux en 2025 :

Ville Taux bâti (%) Hausse annuelle (%)
Paris 20,50 +83 % depuis 2013
Marseille 44,54 +2,6 %
Lyon 31,89 +0,55 %
Nice 35,30 +21,7 % en 2024
Saint-Étienne 44,68 +15 %

À titre d’exemple, si la valeur locative d’un appartement parisien est de 10 000 €, sa base Foncière (après abattement de 50 %) est 5 000 €. Avec un taux de 20,50 %, cela donne 1 025 € de taxe foncière.

💡 Pourquoi cette hausse ?

L’augmentation de la taxe foncière ne tombe pas du ciel. Elle résulte d’un faisceau de mécanismes combinés, dont certains échappent totalement aux communes… tandis que d’autres relèvent de leurs décisions politiques. Décryptons ces trois facteurs majeurs.

Révision des bases cadastrales : le moteur silencieux

La base de calcul de la taxe foncière repose sur la valeur locative cadastrale du bien. Cette valeur, censée représenter le loyer théorique que le bien pourrait générer, est revalorisée chaque année de manière automatique par l’État, en lien avec l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH).

Entre 2023 et 2024, cette revalorisation a été fixée à +7,1 %, soit l'une des plus fortes hausses des dix dernières années. Cela signifie que, même si votre commune n’a pas voté d’augmentation, votre taxe a pu grimper fortement. Selon la DGFiP, plus de 80 % de la hausse nationale de la TFPB en 2024 vient uniquement de cette réévaluation technique, non votée localement.

Exemple concret

Un propriétaire à Lyon avec une valeur locative cadastrale de 10 000 € a vu sa base augmenter de 710 € en un an. À taux constant (par exemple 30 %), cela représente 213 € d’impôt en plus, sans aucune décision de la mairie.

Décisions locales : les collectivités ajustent la pression

En parallèle de la revalorisation nationale, chaque commune peut décider d’augmenter son taux. En 2024, 16,7 % des communes l’ont fait, selon l’UNPI. Cette hausse peut varier de 0,5 à 5 points selon les villes, souvent pour compenser la suppression de la taxe d’habitation ou pour financer des investissements locaux.

Exemples :

  • Saint-Étienne a voté une hausse de +15 % en 2024, ce qui a fait bondir la taxe foncière pour une majorité de propriétaires d’environ 200 à 400 € supplémentaires.
  • À Besançon, la hausse a été de +7 %, votée en conseil municipal pour combler un déficit de fonctionnement.
  • À Nantes, la municipalité a maintenu son taux, mais les propriétaires ont tout de même constaté une augmentation due à l’effet national.

La difficulté pour les contribuables vient du cumul entre hausse des bases et décisions locales. Un simple +1 point de taux local, combiné à une revalorisation nationale de 7 %, peut entraîner des hausses de plus de 10 % sur une seule année.

Inflation et revalorisation automatique : l'effet cliquet

Chaque année, la loi de finances fixe une augmentation minimale des valeurs locatives. En 2025, elle est fixée à +1,3 %, bien en dessous du pic de +7,1 % de 2023, mais toujours active. Ce mécanisme fonctionne même si les loyers stagnent ou baissent. C’est un effet cliquet : la base d’imposition ne baisse jamais.

Et même si l’inflation ralentit, ce système garantit une augmentation systématique de la taxe foncière, que la commune le veuille ou non. Sur dix ans, cet effet d’accumulation est visible. Selon l’UNPI, entre 2013 et 2023, la taxe foncière a augmenté de :

  • +60 % à Paris
  • +42 % à Tours
  • +35 % à Grenoble

Même dans des villes où les services publics ou les investissements n’ont pas évolué à la même vitesse, la fiscalité continue de grimper.

En résumé

✔️ Plus de 80 % de la hausse 2024 vient de la revalorisation automatique.
✔️ Près de 17 % des communes ajoutent une augmentation locale.
✔️ L’effet cumulé peut représenter +10 à +20 % en un an dans certaines villes.
✔️ Et aucune baisse n’est prévue si les loyers stagnent ou que la valeur réelle du bien diminue.

🔧 Comment réagir face à cette pression fiscale ?

Avec une taxe foncière en constante augmentation, de nombreux propriétaires s’interrogent sur les leviers disponibles pour réduire leur facture, ou au moins ne pas subir passivement les hausses. Deux grands axes se dessinent : les évolutions du cadre légal (réformes à venir) et les démarches individuelles accessibles dès aujourd’hui.

Réformes en cours : vers un système plus juste ?

La réforme la plus attendue est celle des valeurs locatives cadastrales, annoncée pour 2028. L’enjeu est de taille : ces bases d’imposition, calculées à partir de données des années 1970, ne reflètent plus la réalité du marché immobilier actuel. Résultat : des décalages énormes entre deux biens comparables dans des villes différentes, ou même entre deux quartiers.

Exemple concret

Un appartement de 60 m² dans un immeuble haussmannien à Paris peut avoir une valeur locative cadastrale très proche d’un logement des années 1980 à Angers, simplement parce que les barèmes historiques n’ont jamais été réellement mis à jour.

Cette réforme vise donc à réduire ces distorsions, et à rendre la taxe foncière plus lisible. Mais attention : elle risque aussi d’augmenter la taxe pour les biens actuellement sous-évalués… d’où la crainte d’un transfert de charge vers les zones les plus tendues.

Parallèlement, plusieurs propositions fiscales sont discutées au Parlement pour indexer le seuil d’entrée à l’IFI sur l’inflation, ou pour plafonner la taxe foncière en pourcentage du revenu, comme c’est déjà le cas dans d’autres pays européens (Allemagne, Pays-Bas…).

Actions individuelles recommandées : ce que vous pouvez faire dès maintenant

Même sans attendre une réforme globale, il est possible d’agir. Voici trois solutions concrètes, accessibles à tout propriétaire, avec un effort modéré mais un vrai potentiel d’économies.

1. Demander la révision de la base foncière

Si vous estimez que la valeur locative de votre bien est trop élevée par rapport au marché, vous pouvez adresser une demande de rectification à votre centre des impôts fonciers. Cela peut être pertinent si :

  • Votre logement a été mal classé lors du calcul initial
  • Le bien présente des défauts importants non pris en compte (mauvaise isolation, nuisances, défauts structurels)
  • Des erreurs figurent dans la description cadastrale (surface, nombre de pièces, dépendances, etc.)

Exemple réel

Un propriétaire à Montpellier a obtenu une réduction de 15 % de sa taxe foncière après avoir démontré, photos et diagnostics à l’appui, que son appartement était situé en rez-de-chaussée sombre et bruyant, contrairement à l’évaluation initiale.

2. Optimiser sa détention : SCI, démembrement, indivision

Si vous détenez plusieurs biens immobiliers, ou un bien de grande valeur, vous pouvez envisager un montage juridique pour alléger la fiscalité :

  • La SCI (Société Civile Immobilière) permet de répartir les parts entre membres d’une même famille, d’anticiper la succession et d’obtenir parfois une décote sur la valeur taxable.
  • Le démembrement de propriété (usufruit / nue-propriété) permet de transmettre tout ou partie d’un bien tout en conservant l’usage ou les revenus.
  • L’indivision aménagée peut aussi être utilisée pour mutualiser les coûts et organiser plus facilement la gestion.

Exemple

Un couple de 65 ans donne la nue-propriété de sa maison à ses enfants, tout en gardant l’usufruit. Résultat : la valeur taxable est réduite d’environ 40 % (selon barème fiscal), ce qui allège l’IFI… et anticipe les droits de succession.

3. Bénéficier d’exonérations liées à la rénovation énergétique

Si vous réalisez des travaux d’économie d’énergie dans votre résidence principale ou dans un bien destiné à la location, vous pouvez bénéficier d’une exonération partielle ou totale de taxe foncière pendant 3 à 5 ans, selon la commune.

Conditions principales :

  • Travaux supérieurs à 10 000 € TTC sur une année (ou 15 000 € sur 3 ans)
  • Bâtiment achevé avant 1989
  • Montant d’exonération voté par la commune (facultatif)

Exemple concret

À Toulouse, une propriétaire a rénové intégralement l’isolation thermique de son immeuble ancien. La ville appliquant une exonération de 50 %, elle a économisé 680 € de taxe foncière pendant 3 ans, soit plus de 2 000 € au total.

🎯 Conclusion

La taxe foncière continue d’augmenter : en moyenne, elle a bondi de 33 % en dix ans, et dépasse aujourd’hui 1 200 € par an dans plusieurs grandes villes comme Paris, Nice ou Saint-Étienne. Pourtant, cette hausse n’est pas une fatalité.

En comprenant les mécanismes qui la font grimper (revalorisation des bases, décisions locales, inflation) et en agissant sur les leviers disponibles, il est possible de reprendre la main. En demandant une révision de la base, en rénovant intelligemment son bien ou en optimisant la détention (SCI, démembrement…), certains propriétaires parviennent à réduire leur taxe de 15 à 40 %.

Et l’avenir apporte aussi des raisons d’espérer : une grande réforme des valeurs cadastrales est attendue pour 2028, avec l’ambition de rendre la fiscalité foncière plus juste, plus lisible et mieux répartie entre contribuables.

❓ FAQ

Peut-on contester une hausse de taxe foncière d’une année sur l’autre ?

Non, vous ne pouvez pas contester la hausse globale elle-même. En revanche, vous pouvez demander une révision de la valeur locative si vous constatez une erreur dans la description cadastrale (surface, nombre de pièces, état du bien…).

La taxe foncière augmente-t-elle après des travaux dans ma maison ?

Oui, si vos travaux augmentent la valeur locative du bien (agrandissement, construction d’une piscine, aménagement de combles…), votre taxe foncière peut être recalculée à la hausse. En revanche, les travaux de rénovation énergétique peuvent ouvrir droit à des exonérations temporaires.

Est-ce que les résidences secondaires sont plus taxées que les résidences principales ?

Oui. De nombreuses communes appliquent une majoration de taxe d’habitation sur les résidences secondaires, mais aussi des taux de taxe foncière plus élevés. Paris, Bordeaux ou Biarritz, par exemple, ciblent ces biens pour lutter contre la pénurie de logements permanents.

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